et de la Route de Fontainebleau à Nemours D607 (ex N7).
Édifiée entre 1655 et 1664, la Croix de Saint-Hérem doit son nom à François-Gaspard marquis de Saint-Hérem, baron de Montmorin et de Saint-Gervais, comte de Volore, seigneur de Chasteauneuf et de la Molière, maréchal de camp, capitaine, garde et gouverneur de la forêt de Bière, bourg et château royal de Fontainebleau, maître particulier des eaux et forêts du bailliage de Melun et prévôté de Moret, capitaine des chasses de ces mêmes lieux, bois et buissons de Brie, maître concierge et gardes des clefs des maisons, château, jardins, parcs, fontaines et canaux de Fontainebleau. (D'après l'état de la France 1699). Saint-Hérem acheta la charge de Grand louvetier de France en mars 1655, à Nicolas de Bailleul et la garda jusqu'à sa mort. Il succéda dans ses charges forestières à Louis Thisboust de Berry en 1656 et dans celles relatives au château, au duc d'Anville en 1661.
La maison de Montmorin tire son nom d'une terre d'Auvergne, elle compte parmi les plus anciennes familles du royaume. Une charte du prieuré de Saucillange mentionne au IXe siècle un certain Calixte seigneur Montmorin, vivant sous le règne de Lothaire Ier empereur d'Occident. La château de seigneurs de Montmorin existe toujours, il est situé sur la commune de Montmorin, à trois km. au sud de Billom dans le Puy-de-Dôme.
Le marquis de Saint-Hérem est né en 1621, il suivit d’abord la carrière des armes et participa au siège d’Arras en 1640, en compagnie de Savinien Cyrano de Bergerac. Capitaine de cent hommes d’armes, il commandait en 1646 le régiment de cavalerie de La Tour-Bassompierre. En 1651, il épousa Anne Le Gras de Vaubercey, fille de l’intendant de la reine Anne d’Autriche. Sa femme lui donna dix enfants et un hôtel particulier (qui existe toujours) situé place Royale, aujourd'hui place des Vosges à Paris.
Saint Simon raconte dans ses mémoires que Madame de Montmorin avait une grande peur des orages. Au premier coup de tonnerre, elle faisait monter tous ses gens sur son lit et se glissait dessous espérant ainsi échapper à la foudre. Elle aimait beaucoup se baigner dans la Seine à Valvins, et quand l'eau était trop froide, elle en faisait chauffer quantité et verser dans l'eau du fleuve afin de la réchauffer.
La guerre civile déclenchée par la Fronde des Princes met les campagnes du sud de Paris à feu et à sang. De nombreux cadavres sont laissés sans sépulture, des loups nécrophages s'accoutument à la chair humaine. Certains animaux s'enhardissent et s'attaquent à l'homme, choisissants parmi les plus faibles des miséreux errants sur les chemins. De 1652 à 1657, plusieurs loups mangeurs d'hommes sont chassés et tués dans une vingtaine de villages du Gâtinais, situés entre la forêt de Fontainebleau et les bois du Hurepoix, on recense 58 victimes. Une première « bête du Gâtinais » est tuée en 1653, elle fait l'objet d'une gravure, voir ci-dessous. En octobre 1655, le marquis de Saint-Hérem devient une célébrité lorsque après huit jours de traque, aidé par une meute de cent-vingt chiens, il réussit à mettre à mort une terrible Male Beste. C’était une louve avide de chair humaine qui semait la terreur dans la population plus d’un siècle avant la célèbre Bête du Gévaudan. Le poète Jean Loret écrivit un récit en vers de l’exploit de Saint-Hérem : « grand louvetier, homme de cœur et de vaillance, et la terreurs des loups de France ».
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apporté à sa majesté par les habitants de Moigny ».
Le marquis de Saint-Hérem jouissait d'avantages très important tirés directement de l'exploitation de la forêt. Il louait à son profit des garennes (Grobois, Queue de Fontaine) et exploitait des taillis et des futaies. En 1664, le grand-maître et reformateur des Eaux et Forêts, Barillon d'Amoncourt, tenta de supprimer ces avantages, mais Montmorin n'en tint aucun compte.
Saint-Hérem était d’une laideur proverbiale, l’écrivain Isaac de Benserade le décrivit comme : « l’homme le plus laid de son temps ». Il s'éteint en 1701.
La Croix de Saint-Hérem.
Son fils aîné, Jean-François-Gaspard de Montmorin, marquis de Saint-Hérem, reçu la survivance de ses charges en 1677 mais ne les exerça pas et entra dans les ordres. Charles-Louis de Montmorin, deuxième fils de François-Gaspard, reçut en survivance les charges de son père en 1686, il exerça réellement en 1701 et mourut en 1722. Charles-Louis de Montmorin distribua contre rétribution et sans autorisation de nombreuses commissions de lieutenant et garde de la forêt. L'arrêt du conseil du 16 mai 1686 annula ces nominations, les jugeant comme « sunuméraire et inutiles ». Jean-Baptiste-François de Montmrorin, fils du précédent (1704-1798), reçu en survivance les charges de son père en 1717 mais il n'exerça que réellement qu'à la mort de son père et jusqu'en 1784. Son fils, Jean-Baptiste-Calixte de Montmrorin (1727-1782), reçu en survivance les charges de son père en 1755 mais il n'exerça pas. Louis-Victore-Hippolyte-Luce de Montmrorin, deuxième fils du précédent, né à Fontainebleau en 1762, reçu en survivance les charges de son père en 1773. Premier maire de Fontainebleau, il fut assassiné avec son fère Armand-Marc, lors des massacres du 2 septembre 1792, à la prison de l'Abbaye à Paris, il n'avait pas trente ans.
Massacre des prisonniers de la prison de l'Abbaye, Jules-Adolphe Chauvet.
Sur le plan de Nicolas de Fer, daté de 1697, la Croix de Saint-Hérem est appelée « de Hérant ». Alexis Durand écrit dans sa Chronologie des fastes de Fontainebleau, que la Croix de Saint-Hérem a été bénite par le père Lebel en 1660. Étienne Pivert de Senancour, dans son roman intitulé Obermann, publié en 1804, parle de la Croix de Saint-Hérant. La croix fut détruite en 1793, puis relevée en 1827, reconstruite en pierre en 1864 par Alexis Paccard sur ordre de Napoléon III et restaurée en 1930.
La route de Fontainebleau à Larchant passe par le carrefour de la Croix de Saint-Hérem. Au Moyen Âge, un pèlerinage important se développa à la basilique de Saint-Mathurin à Larchant, là où se trouvait de précieuses reliques. On y venait demander l’intercession du saint pour la guérison des fous et des possédés. Nombreux furent les rois de France à emprunter cette route, comme Charles IV en 1325, François Ier en 1519, Henri IV en 1599.
Le 16 novembre 1646, Louis XIV, alors âgé de huit ans, et sa mère Anne d’Autriche, régente du royaume, se rendirent au devant du duc d’Orléans, qui revenait de sa campagne en Flandre. Sur le chemin, ils passèrent par le carrefour de Saint-Hérem. Gaston de France, duc d’Orléans, l’oncle du jeune roi, venait de remporter plusieurs victoires face aux Espagnols. Né à Fontainebleau en 1608, le duc était un homme cultivé et amoureux des arts, il prit sous son aile la troupe de Molière. Durant l’été 1649, l’illustre écrivain Pierre Corneille quitta Rouen pour se rendre à Nemours chez le médecin Dubé, un parent éloigné. Sa route passa par le carrefour de Saint-Hérem.
Louis XIV traversa une nouvelle fois le carrefour de Saint-Hérem en novembre 1696, la croix était alors présente. Bien que souffrant de la goutte et de furoncles, le roi tenait à se rendre à Montargis pour y accueillir Marie-Adélaïde de Savoie. La jeune princesse n'avait que onze ans, elle était conduite en France pour y être formée aux usages de la cour et achever son éducation en attendant son mariage avec le dauphin. Elle donna naissance à trois fils, deux moururent en bas âge, le troisième devint le roi Louis XV.
Au début de septembre 1725, le jeune Louis XV traversa le carrefour Saint-Hérem, se rendant au château de Bourron, pour rendre visite à sa future femme Marie Leszczynska. Le roi, âgé de 15 ans, trouva Marie plutôt vieille fille, elle avait déjà 22 ans. Au moins était-elle en âge d’avoir des enfants, contrairement à sa précédente fiancée, l’infante d'Espagne, qui n’avait que 7 ans. Le mariage eut lieu au château de Fontainebleau le 5 septembre, et fut consommé le soir même. Le roi prolongea la lune de miel jusqu'en décembre.
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château de Fontainebleau, le 5 septembre 1725.
Le 12 mai 1771, Louis XV prend le chemin de Nemours pour aller à la rencontre de la princesse Marie-Joséphine-Louise de Savoie, qui venait en France épouser le comte de Provence, âgé de quinze ans, petit-fils du roi et futur Louis XVIII. Âgée de dix-sept ans, la jeune femme est la fille du duc de Savoie et roi de Sardaigne, Victor-Amédée III. La rencontre a lieu au carrefour Saint-Hérem, dès l'instant où la princesse savoyarde descend de son carrosse, la déception se lit sur les visages des Français. La future comtesse de Provence ne plaît pas, elle est trop brune, ses sourcils sont épais, elle est affligée d'un système pileux développé. Pour revenir à Fontainebleau, le roi fit placer la princesse à côté de lui dans son carrosse. Le lendemain, toute la cour partit pour Versailles où se fit le mariage. L'union sera malheureuse et sans enfant.
Le 14 novembre 1773, le roi et la cour se rendent de nouveau sur la route de Nemours au-devant de Marie-Thérèse de Savoie qui vient épouser le comte d’Artois, troisième petit-fils de Louis XV et futur Charles X. Marie-Thérèse est la cadette de Marie-Joséphine, venue deux ans plus tôt, au même endroit, épouser le frère du comte d’Artois. Le carrosse de la princesse s'arrête au carrefour Saint-Hérem, où il est maintenant d'usage que les jeunes mariés de la famille royale se rencontrent pour la première fois. Marie-Thérèse et Marie-Joséphine sont les belles-sœurs de la dauphine Marie-Antoinette. Le mariage a lieu à Versailles le 16 novembre, Charles-Philippe, comte d'Artois, a seize ans, Marie-Thérèse en a dix-sept. Aucune des deux sœurs de la maison de Savoie ne deviendra reine de France, bien que leurs époux respectifs seront tous les deux couronnés.
En novembre 1804, Napoléon et Joséphine arrivent au château de Fontainebleau et le dimanche 25 de ce mois (4 frimaire an XIII), ils se dirigent sur la route de Nemours accompagnés d'un équipage de chasse. L'empereur et sa suite traversent le carrefour de l'Obélisque et, passant devant le polygone de tir, ils sont salués par dix coups de canon tirés par les élèves de l'école militaire. À la Croix de Saint-Hérem, le grand veneur fait son rapport : « Sire, cette nuit trois sangliers se sont introduits dans des fourrés où sont des loups. Peut-être est-il imprudent de lancer une chasse avec nos chiens qui ne sont pas habitués à de tels adversaires. » Napoléon lui répond d'un ton martial : « Nous avons des armes ! ». Mais la chasse ne peut commencer, vers le sud un nuage de poussière annonce l'arrivée d'une troupe escortant une grosse berline. Napoléon n'est pas surpris, il est venu au carrefour de Saint-Hérem pour attendre précisément ce voyageur, c'est le pape Pie VII qui vient pour le sacrer empereur.
On fait mine de s'étonner de cette rencontre faussement fortuite. Alors que les deux importants acteurs de cette pièce sont en train de se saluer, un incident survient. Les chevaux de la voiture impériale s'emportent ce qui sépare les deux souverains. Napoléon en profite pour monter dans la voiture du Pape et s’installer à la droite de ce dernier, place symbolique qu’il entend désormais toujours conserver. De retour à l'Obélisque, la voiture du Pape et de Napoléon prend à droite afin d'arriver au palais par la Porte Dorée, comme le fit Charles Quint en son temps. Napoléon fait les honneurs du château à Pie VII.
Le pape aurait alors dû méditer les vers de Virgile dans l'Énéide : « Nescia mens hominum fati sortisque futurae » — « L'esprit humain ignore le destin et son sort futur ». Le pontife devait revenir à Fontainebleau en juin 1812 et une nouvelle fois traverser le carrefour de la Croix de Saint-Hérem, mais ce fut alors en tant que prisonnier de l’empereur. En 1814, une année après avoir signé le concordat de Fontainebleau, le Saint-Père fut autorisé à rentrer à Rome et prit la route d'Orléans le 22 janvier. Avant de quitter la forêt, il croisa la Croix de Souvray. Le concordat ne fut jamais appliqué et la rancune du Saint-Siège fut tenace, plus aucun pape ne foula le sol français avant Jean-Paul II, en 1980.
L’invasion de 1814 eut, comme l’écrit Denecourt, « un funèbre écho dans notre paisible forêt. » Un kilomètre au sud de la Croix Saint-Hérem, l’armée française plaça douze canons sur le sommet de la vallée Jauberton pour balayer la route de Nemours empruntée par les armées de la Sixième Coalition. Devant l’avancée des forces autrichiennes, bavaroises et russes, les troupes françaises quittèrent la ville de Fontainebleau le 14 février 1814, abandonnant toutes les positions. Napoléon traduisit le général de brigade Montbrun devant un conseil d'enquête pour s'être retiré de Fontainebleau vers Essonnes sans défendre la ville dont il avait la charge avec mille-huit-cent hommes. L’ennemi occupa aussitôt ce qu’on appela ensuite « la Redoute de Bourron ». La position fut reprise par les généraux Charpentier et Allix de Vaux.
Le 15 juin 1816, à la Croix Sain-Hérem, Louis XVIII vient avec son neveu, Charles-Ferdinand d’Artois, duc de Berry, à la rencontre de la princesse Marie-Caroline de Naples et de Sicile, qui va devenir duchesse de Berry. Le 13 janvier 1820, le duc de Berry est blessé à mort par le bonapartiste Louis Pierre Louvel. Agonisant, il murmure à sa femme Marie-Caroline alors enceinte — « Mon amie, ménagez-vous pour l'enfant que vous portez dans votre sein ». Le 29 septembre 1820, Henri Charles Ferdinand Marie Dieudonné d'Artois, duc de Bordeaux, naissait aux Tuileries, c’est le nouveau dauphin de France, il est aussitôt surnommé « l’Enfant du miracle ». Henri V ne régnera jamais, les Bourbons furent remplacés en 1830 par les Orléans, eux-même chassés en 1848 et plus aucun roi ne régnera sur la France.
et sa future épouse, Marie-Caroline de Naples.
Le 20 juin 1913, à la maison forestière de la Croix Saint-Hérem, fut fondé l'Association des Naturalistes de la vallée du Loing et du Massif de Fontainebleau : ANVL.
Maison forestière de la Croix Saint-Hérem.
La Croix de Saint-Hérem.
Coordonnées géographiques de Croix de Saint-Hérem : 48°21'47.2"N 2°41'29.8"E