Les incendies de la forêt.

Le fléau que sont les incendies en forêt de Fontainebleau est aussi ancien que celle-ci. Sur son sol sec, recouvert de bruyères et d’aiguilles de pin séchées, le feu fut de tout temps redoutable par sa fréquence et sa violence. Dès 1318 une ordonnance interdisait de « faire des cendres dans la forêt ». En 1366, Charles V étant à Fontainebleau, confirma les privilèges que ses prédécesseurs avaient donnés aux villages bornants la forêt, à condition notamment d'avoir l'obligation de participer à la lutte contre les incendies. En 1518 des forestiers pris en train de bivouaquer autour d’un feu furent fouettés, marqués au fer rouge et bannis à perpétuité. Le nom d’anciennes parcelles, Le Mont-Enflammé, Le Chêne-Brulé, doivent leurs noms à des sinistres qui marquèrent les esprits.


En 1625, un grand incendie brûle les bois autour de l’ermitage de Saint-Louis. Le 28 juin 1680, Louis XIV donne un grand dîner à Franchard, les flambeaux accrochés aux arbres déclenchent un incendie obligeant la cour à une retraite précipitée. Pareil incident avait déjà eu lieu au même endroit en novembre 1661, l’organisateur de la fête était alors Monsieur, le frère du roi. L’année suivante, les chroniques mentionnent un incendie allumé volontairement pour étourdir un essaim de mouches à miel et qui devint vite incontrôlable, de vastes surfaces au canton du Bas-Bréau furent dévastées.


En 1714, allumer un feu était puni du fouet et de galère en cas de récidive. Pour le pyromane qui préméditait son geste, c’était la peine de mort. Le 5 septembre 1726, éclata un incendie terrible, la forêt brûla pendant huit jours. Le feu ne fut éteint que grâce aux pluies abondantes qui survinrent, mais les auteurs du sinistre restèrent impunis. Ce fut l’un des incendies les plus considérables que l'on n'ai jamais vu, les Gorges de Franchard et d’Apremont furent entièrement détruites. Les guerres de 1815 et 1870 provoquèrent de nombreux feux de forêt. L’arrivée du train en 1849 fut aussi source d’incendie, les premières locomotives projetaient des charbons enflammés. Avec le chemin de fer, le nombre de touristes augmenta et l’allumette du fumeur, comme ses mégots, furent la cause de nombreux sinistres.

Incendie du Rocher Canon, Le Monde Illustrée du 27 juin 1874

On reprocha à Denecourt d’être la cause des nombreux incendies qui détruisaient la forêt, de par le nombre toujours croissant des touristes visitant le massif, guide Denecourt en poche. Le sylvain se défendit en faisant remarquer qu’il n’était pas responsable de l’usage du cigare, devenu général et à l’emploi sans précaution des allumettes chimiques. Il a pu voir lui même l’inconscience des promeneurs en voiture, « jeter à toute volée leur bout de cigare encore embrasé ; et voilà d’où viennent les incendies qui éclatent sur les bords des grands chemins. » Il rappelle qu’il n’y est pour rien dans l’accroissement des végétaux facilement inflammables, comme les aiguillettes de pins, les broussailles et bruyères qui envahissent les chemins qui ne sont pas entretenus contrairement à ses sentiers. Il fait remarquer que la plupart des incendies ont lieu dans des secteurs de la forêt où ne passe aucun de ses sentiers et préconise le débroussaillage des routes de chasses, des routes cavalières et tous les chemins et sentiers de promenade. Sans aller jusqu’à interdire l’usage du feu en forêt, ce qui sera fait bien plus tard, Denecourt recommande plus de précautions : « Oui vous, messieurs les artistes et touristes qui faites usage de la pipe et du cigare, veuillez, je vous en supplie, au nom de tous les admirateurs de nos sites, songer aux conséquences qui peuvent résulter de la moindre inattention. N'ajoutez pas, par de nouveaux sinistres, au plaisir de certains ennemis assez haineux pour désirer vos imprudences, sinon pour faire pire. »

Grand incendie de la forêt de Fontainebleau. Le Petit Journal daté du 22 avril 1893.

De 1863 à 1902, plus 520 feux de forêt sont répertoriés. Le 13 août 1876, le Mont Chauvet brûle, les gardes forestiers en gravent le souvenir sur plusieurs rochers. En 1893 c’est le Désert d’Apremont qui part en fumée et redevient ce qu’il était autrefois, un désert. En 1897, les Gorges de Franchard sont de nouveau ravagées. Séverine, la célèbre féministe, décrit ainsi les dégâts : « Vous vous souvenez de cet océan de feuillage, riant et verdoyant, qui faisait de ces gorges comme un géant nid de mousse ? Depuis le vert noir des sapins jusqu’au vert pâle des bouleaux, c’était une variété de nuances incomparable, toute la gamme et toute la lyre. Or maintenant c’est une vision d’enfer, un gouffre ... Le blanc des rocs, le noir des cendres et c’est tout ! ».

Inscription sur une plateforme de grès en souvenir du grand incendie du 13 août 1876. 

LE Mont CHAUVET
BRULE en aout 1876
SEME eN MARS 1877
H MORAND GE FR
A LA SOLLE


Inscription sur le rocher Richard-Lenoir du Mont Chauvet, 
en souvenir de l'incendie du 13 août 1876.


L’incendie de 14 et 15 août 1904 est catastrophique, 3000 soldats pompiers sont mobilisés et 300 hectares partent en fumée, le Clovis, un des plus vieux chêne de la forêt est détruit. En 1911 un incendie ravage le plateau de la Mare aux Fées et la partie est de la Gorges aux Loups, (parcelle 526), furent ainsi détruits quelques arbres remarquables, comme le chêne de Marie-Antoinette. Après les trois derniers grands incendies de 1893, 1897 et 1904, l’administration forestière, en voie de modernisation, implanta les premières tours d’observation. Le 15 avril 1933, plus de 50 hectares des Gorges d’Apremont sont complètement ravagés, c’est le plus grave incendie sur Apremont depuis 1893, tout les arbres sont à replanter.






En 1943 l’armée allemande incendia le massif des Trois Pignons pour chasser les maquisards, la région fut entièrement ravagée. Maurice Martin témoigne : « Ceux qui ont connu la région des Trois Pignons il y a quelques années, ne peuvent y revenir sans évoquer, avec regret et amertume, cette mer de forêt qui les y attendait, ils ne peuvent oublier ces épaisses couches de mousse où l'on enfonçait jusqu'à mi-jambe... Mais après les années 43, 44, 45, à part de rares bosquets, partout le désert, le sable à nu, les souches calcinées ». Après la guerre, en 1959, les Gorges d’Apremont sont ravagées. La grande sécheresse de 1976 est la cause de plus de 160 incendies, mais la détection obtenue grâce aux tours de guet permet de limiter les dégâts à moins de 80 hectares détruits.


Le 9 septembre 2012, environ 8 hectares disparaissent dans les flammes au Rocher Cailleau, parcelle 170 de la forêt domaniale des Trois-Pignons.



Incendie du Rocher Cailleau.

Le 16 avril 2014, 6 hectares de forêt touchés à La Canche aux Merciers, parcelle 106, forêt domaniale des Trois-Pignons.





Le 27 mai 2015, un incendie a ravagé 6 hectares de la platière du rocher de Milly, parcelle 781.






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