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La bataille de Valvins, mercredi 23 août 1944.


Char américain Sherman appartenant au 735th Tank Bataillon, devant la mairie de Fontainebleau.

C’est vers midi que le 11e régiment de la 5e division d’infanterie américaine dite « Red Diamond » atteint Fontainebleau et traverse la ville sous les vivats de la foule. Les hommes de ce régiment font partie de la 3e armée US commandée par le célèbre général Patton. Ils ont débarqué à Utah Beach le 10 juillet 1944 et se sont durement battus en Normandie. Arrivés à la gare d’Avon, les Américains découvrent et désamorcent des explosifs qui ont pour but de faire sauter le viaduc de Changis. Ont fait quelques prisonniers — où sont les Allemands ? Ils sont à Valvins et se replient sur la rive droite de la Seine sur Vulaines et Samoreau. 

Des soldats américains et un tank M10 avancent vers la Seine sur l'avenue de Valvins.

Le 2e bataillon est envoyé en reconnaissance. Les hommes descendent l’avenue vers la Seine, au moment où ils arrivent à Valvins, le pont saute, mais sa destruction est incomplète. Les soldats américains sont pris sous le tir des Allemands retranchés sur la rive opposée. Il faut agir, le lieutenant-colonel Kelley Lemmon repère des canoës un peu en amont du fleuve, arrimés sur la rive tenue par l’ennemi. Courageusement, sous les tirs des snipers, Kelley traverse la Seine à la nage, s’empare des embarcations et les rapporte sur la rive de départ (il recevra la Distinguished Service Cross pour cet acte de bravoure). Le feu allemand s’intensifie, des obus explosent faisant beaucoup de victimes. Se servant des canoës, la compagnie du capitaine Jack Gerrie traverse le fleuve et attaque l’ennemie, d’autres compagnies suivent à bord d’embarcations de fortune. Les Allemands comprennent le danger et un furieux tir de barrage s’abat sur les Américains, la bataille de Valvins est engagée.

Le commandant Kelley Lemmon (1912-2012) et ses hommes.

Les Allemands ont décidé de se battre, ils demandent des renforts et une colonne de blindés remonte quai des Plâtrerie à Samois. L’aviation américaine les repères et les chasseurs-bombardiers détruisent les véhicules ennemis. Les Américains entament le nettoyage de la rive droite de la Seine, les combats sont difficiles, les Allemands se retranchent derrière les maisons, les haies, les arbres, les talus. Positionnés sur les hauteurs de Vulaines, des chars Panzer pilonnent à coup de 75mm les deux rives du fleuve. La nuit tombe, le feu allemand se calme, les pontonniers américains en profitent pour commencer la construction d’une passerelle qui enjambe la Seine. Mais le répit est de courte durée, vers 22h, les Allemands lancent une contre-attaque, repoussée par les GI retranchés dans les trous qu’ils ont eu le temps de creuser. Vers 23h, les Allemands attaquent de nouveau, en plus grand nombre cette fois, mais l’artillerie américaine a eu le temps de se déployer et repousse l’ennemie sous un feu nourri. Peu après minuit, un orage s’abat sur les combattants épuisés, transformant les trous individuels en cloaque. Les chars s’embourbent, la nuit est parsemée de fusées éclairantes tirées par les deux camps.

Jeudi 24 août, un peu avant le lever du soleil, les combats reprennent, les Américains continuent de traverser la Seine subissant toujours le feu ennemi, encore des morts. L’aviation ne peut pas intervenir, le plafond nuageux est trop bas, il pleut. Vers midi le temps s’améliore, le soleil fait son apparition timidement et les combats reprennent de plus belle. L’artillerie américaine s’est considérablement renforcée pendant la nuit, elle établit un puissant tir de barrage devant la tête de pont américaine, empêchant toute contre-attaque allemande. Les canons sont placées dans le parc de la Faisanderie à Fontainebleau, ils tirent jusqu'à 40 coups toutes les 15 secondes, les obus pleuvent sur la rive droite de la Seine, les habitants sont terrés dans les caves subissant la terreur d’un bombardement intensif. Vers 16h, le pont flottant est enfin prêt, permettant à de nombreuses unités américaines de se déployer dans Samoreau et Vulaines, puis vers Héricy et Champagne-sur-Seine, quelques unités allemandes résistent encore farouchement. Le soir tombe et la nuit est calme, le vendredi matin les Allemands se replient définitivement. C’est l’heure du bilan, parmi les soldats américains on compte une soixantaine de morts et de très nombreux blessés, environ 250 soldats allemands sont retrouvés morts. Quelques civils ont perdu la vie ainsi que plusieurs résistants.

- D'après le témoignage de M. Jacques Hitzel, publié dans la Revue d'Histoire de Fontainebleau, n°4 daté de mai 2013.
- Sur la libération de Fontainebleau et la bataille de Valvins : « Cinq mois d’histoire locale à Fontainebleau (juin-octobre 1944). Le carnet d’un témoin de la Libération » par Pierre Doignon, 1955.

Monument « Patton » à l’entrée de Vulaines et Samoreau, entre la rue Royale (D210) et la Voie de la Liberté.

GENERAL GEORGES PATTON JR.
SOUS SON COMMANDEMENT
LA TROISIEME ARMEE AME-
RICAINE APPUYEE PAR SES 
CAMARADES FRANCAIS A TRA-
VERSE LA SEINE A CET ENDROIT
LE VINGT TROIS AOUT 1944

CETTE PLAQUE A ETE 
POSEE PAR LES ANCIENS
COMBATTANTS DE LA 
TROISIEME ARMEE 
AMERICAINE A LA MEMOIRE 
DE  LEUR COMMANDANT.